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UNE CONTRE-HISTOIRE DE LA DOUAT

Fuyons les spéculations oiseuses sur la Douat qui n'est en interdépendance avec rien de ce qui concerne les vivants. Ce n'est pas à elle à s'adapter à nos mentalités ou à nos croyances. Un prêtre avisé de l'Ancien Empire a osé dire que la Douat était un feu qui ne s'éteint pas et produit une lumière particulière venue des confins d'un univers en gestation.


Une question se pose : est-il possible d'exister, de ne pas exister ou encore d'exister autrement ?

Les astrophysiciens ont inventé la notion d'éternité pour nous laisser croire que nous ne disparaîtrons pas, en négligeant le fait que les dieux et les humains ne vivent pas du même côté de cette pseudo-éternité.


Les Kémitiens étaient préparés à une approche subtile des grandes questions métaphysiques. Pour eux, la Douat était un Ailleurs que l'on peut explorer dans certaines circonstances et avec beaucoup de précautions. Un Ailleurs à la fois spatial et temporel, en apesanteur à l'intérieur de nos 9 Constituants.

On est certainement plus performant si on marche rituellement dans la Douat. Entre le début et la fin d'un rite, nous devenons des habitants de la Douat imprégnés du parfum des résines de Pount.



La Douat ressemble à ce que nous pourrions être si nous avions atteint l'état d'ataraxie permettant de toucher le point de non-retour à la manière de l'infatigable Scarabée.

La plupart des netjerou ne s'aventurent pas dans la Douat de peur d'y croiser des intrus, des indésirables, des résidus de ce qui n'aurait jamais dû sortir au jour.

Ici, rien n'est vrai ou faux, tout est envisageable, en attente, en cours de manifestation ou d'occultation. Le Vide est une des formes de la réalité.


On prend conscience des ténèbres quand on s'éloigne de la lumière. Akhnaton a traqué ce moment ou ténèbres et lumière se confondent. Il s'est minéralisé en espérant que sur l'autre rive l'éternité lui serait favorable, lui qui avait renoncé à couvrir de dalles les toits des temples.


La Douat pourrait être la trajectoire de la flèche entre l'archer et la cible, les quelques secondes mises par un corps pour s'écraser au pied de la falaise, la tension exercée par un Soleil sur le point de se lever dans l'Akhet.

Sera délicate la traversée de la Douat pour celui qui ignore les limitations de son intelligence, de ses capacités à comprendre ce qui reste caché par absolue nécessité.

Pourquoi discourir sur la Douat au lieu d'attendre qu'elle nous investisse, nous retourne comme un gant, nous apprenne à marcher sur la tête ?


Avant la fin du monde, il nous faudra réformer en profondeur notre vision de la Douat qui, pour l'instant, est restée coincée entre Nout et Geb.


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