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Sur la piste des Sphinx

On trouve trace des sphinx dans les traités de tératologie, la science qui étudie les monstres.

Monstre : du latin Monstrum, ce qui est digne d'être montré, donc admirable.

Le monstre est à la limite du naturel et du surnaturel. Naturels le corps de félin et la tête humaine du sphinx, surnaturel ou prodigieux l'assemblage des deux.

Nous tenons les sphinx pour des créatures fictives, sorties de l'imagination des mythographes. Les Egyptiens les envisagent comme des êtres bien réels que l'on peut croiser lorsque les circonstances sont favorables. Comme tous les félins, ils avancent sans faire de bruit, en déplaçant un minimum de particules.

Parce qu'ils ne meurent pas, les sphinx détestent les nécropoles, les odeurs de putréfaction. Le climat sec et léger de Kemet leur convient parfaitement. Ils n'eurent jamais l'idée de s'installer ailleurs, en des contrées humides qui sentent le compost.





A vrai dire, on sait fort peu de choses sur ces êtres paradoxaux qui semblent avoir été créés pour intriguer les esprits curieux et mettre en fuite les profanes ou ceux qui s'écartent de la voie du milieu. Pour autant, ce ne sont pas des monstres dévorateurs tels ceux qu'on croise dans les légendes et les contrées intermédiaires.

Ils n'ont pas disparu parce qu'ils possèdent des qualités particulières comme de passer en un clin d'œil du visible à l'invisible, de l'autre côté du champ des apparences. Ils se jouent des alternances ordinaires et des discours que les Egyptiens ne tiennent pas sur eux. Aucun texte kémitien ne révèle la vraie nature des sphinx mais ils restent bien présents dans l'iconographie, la statuaire et dans l'esprit des visiteurs modernes de la Vallée du Nil.

La vraie star du site de Guiza n'est pas la Grande Pyramide mais le Sphinx colossal qui veille au pied du plateau dans la position d'un gros chat faisant semblant de dormir. Au fil des millénaires, le désert a essayé à plusieurs reprises de l'avaler. Il a toujours réussi à le repousser en y laissant quelques plumes, comme sa barbe divine et le bout de son nez mesurant 1,85 mètre.

Il multiplie les énigmes : Qui est-il ? Quel est son âge véritable ? Que fait-il en cet endroit si particulier ? Que cache-t-il sous son ventre ?

On lui connait de nombreux qualificatifs comme le Grand Dieu, le Seigneur du ciel, le Dieu parfait, le Dieu vivant, le Souverain de l'éternité, le Maître du désert, Celui qui est sur ses sables, le Souverain des nuées...

Son vrai nom est Hor em Akhet, Hor dans l'Horizon, image du faucon horien, de Râ, de Khépri et du démiurge Tem. Protecteur de la royauté, il symbolise la victoire du faucon solaire sur les forces hostiles à l'ordre divin, celui qui a le pouvoir de faire se lever le soleil chaque matin.

Il est en liaison avec le BA royal et l'arcane X du Tarot.


Une chose est sûre, tous les Egyptiens, sont habitués à cohabiter avec les aspects magiques du monde.


Le nom du sphinx en hiéroglyphes est Shesep Ankh, la statue vivante. Le radical du mot désigne des choses magnifiques et luxueuses.

Le hiéroglyphe NEB, le maître, peut aussi servir à écrire le mot sphinx.

Au Nouvel Empire, il porte le nom de HEROUN. Oun signifie ouvrir, exister, courir. Il y a aussi dans le mot le son rou qui désigne le lion et la porte. A l'origine, le sphinx a pu être un lion chargé de garder les portes ou le seuil du temple.


En Alchimie, le lion est le roi des autres métaux. Celui qui résout ses énigmes comprend les secrets de la Nature. Il se manifeste à l'un des moments les plus délicats du Grand Œuvre, la Distillation, dont le hiéroglyphe est l'Horizon Akhet.

Michael Maier souligne que le sphinx représente l'extrême finesse du savoir hermétique, les complications de l'Œuvre, les mystères cachés, la connaissance secrète conduisant à la Pierre Philosophale. Echouer devant le sphinx revient à mourir.


L'étrangeté des sphinx est calculée et se nourrit de notre contemplation. Je ne sais plus si c'est moi ou lui qui se tient sur le seuil ou de part et d'autre de la frontière. Le trouble s'installe parce que nous sommes face à un chef-d'œuvre aux charmes infinis.


Pour finir, je ne puis résister au plaisir de vous montrer cette image peinte dans la tombe des artistes Nebamon et Ipouky, dans la nécropole thébaine de Khokha.

Le sculpteur est en train de peaufiner le cobra royal sur le front du sphinx. Il semble bien qu'il s'agit ici de la touche finale.

Au-dessus du sphinx, un pot à parfum ou balsamaire qui rappelle que cette créature incomparable est originaire du Pays de Pount, la contrée des encens et des essences parfumées.




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