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SANCTUAIRES

Nous ne revisitons jamais assez les anciens sanctuaires parce que nous ne sommes jamais assez seuls.

On appelle sanctuaire ce qui échappe aux perversions ordinaires liées à l'entropie, à la lassitude, aux regrets, aux acides.



Les sanctuaires de Kemet sont couverts d''images stupéfiantes, incroyablement vivantes qui battent des ailes quand nous feignons de fermer les yeux. Elles n'enseignent rien, elles nous maintiennent en alerte, prêts à affronter les visions d'un monde en permanent décalage avec lequel nous ne sommes ni en avance ni en retard mais en simultanéité. Il y a un moment où les images s'arrêtent.


Un calme trompeur règne dans les sanctuaires de Thot où la vigilance est de rigueur.

Dans les sanctuaires osiriens, on fuit son passé mais on ne sait rien encore de son devenir.

Seth laisse croire que les sanctuaires de son frère sont inoffensifs, même s'ils sont des lieux de passage où peut se déchaîner la Magie de Kemet.

Dans les sanctuaires d'Aset, on régresse jusqu'à redevenir un embryon dans les eaux amniotiques d'un Noun en état d'hypnose. Les pèlerins viennent dans ses temples pour se ressouvenir des pistes conduisant à la tête coupée du dieu noir, au centre d'une île souterraine implantée dans une aire trop sainte pour devenir une nécropole.

Dans les chapelles de Maât, les aubes se succèdent sans interruption.

Puissance lumineuse d'une Maât capable de se dédoubler.



Je me suis assoupi dans le sanctuaire d'une divinité aux ailes bleues qui refusait de montrer son visage. Passer une nuit dans un téménos bien vif ôte l'envie de s'éloigner.


Des pans entiers du sanctuaire sont maintenant ensablés. Le plan n'est plus lisible mais son BA continue de l'arracher à la pesanteur. Le Ba, libre par nature, échappe à tout contrôle, ne craint pas les recoins obscurs où les pierres se délitent.

Les Esprits errants du désert pénètrent rarement dans les espaces sacralisés par les rites. Ils ne s'en tiennent jamais très éloignés non plus.


Au milieu des ruines, la prêtresse de Sechet observa les lignes de ma main. Elle parla de démesure, de murmures, de sources, d'amenuisements, d'ombres spécieuses, de visages voilés, d'un flambeau que je n'aurais pas dû laisser s'éteindre. Je n'ai rien compris à ce discours que je n'avais pas demandé d'entendre. J'attends une consolation de la seule contemplation des pylônes effondrés, des obélisques brisés, des sphinx dont on a fracassé le visage, des salamandres qui n'en finissent pas de brûler, de la vision bouleversante d'un monde en train de tomber en poussière.

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