Tout ce qui existait sur ce site avait peu à peu été déconstruit mais le sol se souvenait encore du poids des blocs de quartzite et de granit, des ondes qu'ils émettaient quand une prêtresse le traversait en tentant d'ajuster les phases d'un rituel. Quand j'entrais ici au temps de la splendeur, je marmonnais une eulogie aux divinités qui n'empêchent pas les évènements de suivre leur cours. Nous avons besoin d'être rassurés avant de tomber en poussière, nous supposons que la cendre contient le diadème du roi en ce lieu consacré au Benou cramoisi.
Je passais lentement de la profondeur à l'intensité. Je ne pouvais m'arracher à ce territoire qui ne relâchait son étreinte qu'aux dernières heures de la nuit quand Nout, la truie divine, commence à dévorer ses étoiles-porcelets. A l'intérieur du sarcophage, Nout regarde le mort qui ne sait pas encore qu'il est en train de s'incruster dans une pépite d'or enfouie au fond d'une galerie de mine.
Qui est le dieu derrière le masque ? Sur quoi ses yeux se posent-ils ? Il vit à l'intérieur d'un téménos où résida autrefois une des multiples formes de Seth, le principe déstructurant des esprits en attente. Soudain passe le fantôme d'une source ou plutôt d'une résurgence. Un jour encore nous ne mourrons pas de soif mais continuerons à formuler des hypothèses sur les mystères de Kemet. Existe-t-il un autre monde à l'intérieur de nous ? Un monde trahissant la dangereuse beauté des origines quand la cité d'Héliopolis tomba en ruines avant d'être construite. Ce qui est en attente d'identité est-il mémorisable ?
Je reviendrai dans un autre corps, ma voix n'aura plus les mêmes intonations, je serai toujours vivant dans cette roselière où viennent se reposer les BA des oiseaux migrateurs.
De leur passage ne reste qu'une plume qui nous fascinera encore longtemps.
コメント