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LES LUNES DE SATURNE

Enfant, le Fils de Hapou ne craignait pas la profondeur, les formulations ésotériques, la pensée qui sait s'arrêter net, le Mystère suspect mais pas inattaquable.

Equilibre entre les heures de veille et celles de vacances hiératiques.

Hapou, son père, racontait que son fils le prenait toujours au dépourvu sans menacer l'intégrité de son esprit.

Il n'utilisait pas les mots qu'on attendait, ce qui dynamitait les effondrements, minait les logiques trop bien huilées.

Une ruine des systèmes qui se complaisent dans la fadeur.




Qui est cet enfant ? se demandait sa mère en remerciant Khentekhtaï de l'avoir mis au monde.

L'émerveillement intérieur suscite la multiplication des plans, l'étirement des perspectives mais aussi les euphories triomphantes dont il faut se méfier.

Ce garçon troublait ceux qui ne laissent aucune chance au hasard en se réfugiant dans la béatitude.

Au-delà du hasard, on devient un composé en suspension dans l'aludel, qui se garde de rompre les alliances avec le dieu à tête de cynocéphale aux aguets sur les lunes de Saturne.

Plusieurs lunes en orbite autour de la planète philosophale, des lunes aussi dans le ventre, la tête et la glande pinéale qui permettent d'ouvrir les naos dans le temple.


Le jeune Fils de Hapou ne s'inclinait pas devant les évidences menant au conformisme, la forme la plus hideuse de la mort spirituelle. Les enfants ne sont pas obsédés par la vie, ils ignorent l'existence des amoindrissements, ils n'ont pas commencé à survivre.

Le premier scribe qui s'occupa du Fils de Hapou nota qu'il était toujours à l'heure en donnant l'impression d'être en décalage.

Pendant toutes ses années d'apprentissage, son activité principale resta la traque des occasions d'être surpris.

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