ARCANES : L'étymologie de ce mot aujourd'hui galvaudé renvoie au latin classique ARCA, pluriel ARCANA, un coffre et à son dérivé ARCANUS, un adjectif qui se rapporte au secret, au discret, au caché, aux structures dissimulées, au déroutant, à l'incompréhensible. Pensez aux lames du Tarot nommées justement Arcanes qui nous permettent de naviguer à vue mais en toute conscience dans les énigmes récurrentes de notre petite existence. Bref, c'est dans le coffre que se trouve le trésor du pirate.
Pour aborder la Connaissance, un sujet éminemment casse-gueule, nous n'allons pas nous mettre la rate au court-bouillon en dépit d'un titre quelque peu prétentieux.
L'ignorance, antonyme de la connaissance, est une des formes les plus pernicieuses du mal non quand elle est subie mais revendiquée.
Etant étudiant, quand je pénétrais dans une bibliothèque universitaire, j'avais le sentiment d'entrer dans le temple de la connaissance, d'être à l'abri de la méchanceté du monde et des ennemis de SESHET, principe divin de nature féminine incarnant en Egypte les multiples bienfaits de la lecture, de l'écriture, de l'investigation et de la magie opérative des hiéroglyphes.
Les ignorants n'ont de cesse de brûler les bibliothèques, de pratiquer des autodafés avec des livres, des rouleaux de papyrus, des codex qui rendent libres ceux qui les aiment, les dévorent à la lumière d'une chandelle ou d'une ampoule à économie d'énergie. Lire pour apprivoiser le bonheur de vivre, écrire ou taper sur un clavier pour donner à la connaissance une nouvelle opportunité de se répandre
Le Fils de Hapou fit remplir de rouleaux de papyrus son sarcophage avant de disparaître pour toujours dans le désert occidental où les montagnes, les dunes et les falaises ouvrent des perspectives infinies et déclinent toutes les tonalités de la lumière.
Une amie très chère me fit entendre qu'un blog sur le Net me permettrait d'échanger quelques idées inédites, de répandre des fluides, non pas de l'érudition mais une opportunité de ramener à la surface des petits poissons d'argent, des méditations glanées sur les rives du Fleuve divin. Comment mieux libérer les signes éparpillés dans ma mémoire, réanimer ce qui aurait bien pu se perdre dans les sables mouvants.
La connaissance est un bien qui ne se reçoit pas en héritage. On doit lui courir après, cheminer à sa suite, la capturer dans ses rets, la serrer sur son cœur. Elle est embusquée dans les incunables, les maisons des Muses, les jardins de la Renaissance comme Bomarzo, les peintures d'Uccello, les traités des adeptes de Thot-Hermès, les yeux des chats, dans la moindre pierre d'un temple de Kemet. Elle peut être douce quand elle alimente les préméditations ou violente quand elle provoque des séismes intérieurs. Connaissance entrelacée à des spéculations singulières péchées dans les profondeurs ou en surface quand le terrain ou le moment sont favorables.
Quand j'ai rencontré Max, j'ai eu la certitude que j'allais enfin apprendre quelque chose de nouveau, les vieux hiéroglyphes encrassés allaient en prendre un coup. Il disait que pour comprendre un homme, il fallait parler sa langue, goûter la saveur de ses mots, chanter avec lui, écrire avec ses calames et ses encres, le suivre sur les sentiers menant aux sanctuaires cavernicoles où les puissances telluriques se tiennent en embuscade. La connaissance opère des ajustements avec ce que nous sommes, ce que nous avons été, ce que nous rêvons de devenir. C'est un fil de trame dans un univers où s'entrelacent les plans, les temporalités, les hypothèses, le taraudant désir d'être ailleurs et différent.
En Egypte deux principes divins, assistants judicieux de Tem et Râ, sont au service de la connaissance : SIA et HOU que dans les syringes de la Vallée des Rois on trouve embarqués sur le bateau du Soleil Noir traversant les 12 heures de la nuit.
Dans l'iconographie, rien ne permet de les distinguer si ce n'est leur nom écrit au-dessus d'eux, formes accroupies et momifiées tenant un ankh. Le nom de Sia s'écrit avec le hiéroglyphe d'une mèche de lin tressée - à droite sur l'image-, Celui de Hou avec l'idéogramme d'une défense d'éléphant - à gauche -.
Dans les tombes, ils deviennent des silhouettes dressées, encadrant le naos du soleil Noir.
Les mythes racontent que Sia a été engendré par une goutte de sang sortie du phallus blessé de Râ.
Sia-Hou sont les deux attributs essentiels du Netjer.
Dans le corps humain, Sia siège dans le cœur et Hou sur la langue.
SIA est un autre mode de pensée, l'intelligence totale et prévoyante, le discernement, la faculté de perception, la connaissance intuitive menant à la sagesse.
Grâce à lui, nous pouvons saisir instantanément les causes d' un événement .
Il est associé à Djéhouty-Thot.
HOU est le Verbe créateur démiurgique, la pensée créatrice, ordonnatrice, l'ensemble des connaissances possibles léguées par un netjer créateur.
Son nom vient du verbe hww, annoncer et pourrait se traduire littéralement par le lien qui mène à l'existence.
Il est associé à Hor.
Ce soir, avant de vous endormir, n'oubliez pas de prier Sia et Hou afin qu'ils vous donnent des rêves prémonitoires et vous permettent de vous réveiller moins idiot.
Aux cascades des méditations, la Connaissance sourd dans le Silence. La Foi révèle mieux notre ignorance,