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LE SERVITEUR DU FILS DE HAPOU

Khainpou est mon serviteur. Il s'occupe de tout dans la maison, ménage, cuisine, lessive, bricolage, courses et mille petits travaux domestiques. J'ai une dizaine de jardiniers, il ne s'occupe donc ni des arbres ni des plantes mais je le vois souvent les caresser et leur parler.



Je n'ai jamais eu besoin d'un serviteur. Khainpou a débarqué chez moi un beau matin et m'a persuadé que j'avais besoin de lui. Un homme aussi occupé que moi ne pouvait s'occuper du ménage ou de la cuisine. Il m'affirma qu'il était silencieux et discret, qu'il ne troublerait pas ma tranquillité et chasserait même les importuns et les bavards invétérés. Quand mon matou s'installa sur ses genoux, j'acceptai ses offres de service.


Quelques jours après son installation, j'avais l'impression qu'il avait toujours été là, que je le connaissais depuis des siècles et ne pourrai désormais me passer de lui. Je m'étais attaché à sa présence, à son efficacité, à son odeur et à son magnétisme.


J'ai alors découvert que le scribe qui m'était attaché truffait mes textes de fautes d'orthographe et de syntaxe au point de déformer ma pensée, de la rendre inintelligible. En outre, ses hiéroglyphes partaient dans tous les sens. Je le renvoyai quand je découvris que Khainpou savait lire et écrire, qu'il connaissait la géographie, l'histoire de Kemet, de ses dieux et même les textes ardus de l'Ancien Empire. Devenu mon secrétaire particulier, il n'abandonna pas pour autant les travaux domestiques. Ses journées étaient bien remplies mais il ne se plaignait jamais, ne perdait pas son entrain, sa bonne humeur, sa joie de vivre.


Le prince héritier Amenhotep venait régulièrement chez moi pour être instruit sur l'art de gouverner ou sur des sujets aussi délicats que les 9 Constituants. Khainpou assistait à nos entretiens et je voyais qu'il était des plus attentif. Il avait à peu près le même âge qu'Imy et ils devinrent très proches, heureux d'être ensemble. J'encourageai cette amitié car mon petit serviteur avait un effet apaisant sur le tempérament inquiet du prince.


Khainpou est précieux, me déclara un matin Imy, tu as de la chance d'avoir un tel garçon à ton service mais sais-tu d'où il vient ?

Je ne connais rien de ses origines, il est venu s'installer dans ma vie, j'en remercie Bès et Aset.

Il n'est pas arrivé par hasard, il t'a été envoyé par Khamhor, le Grand des Voyants du temple d'Héliopolis dont il est le neveu.

Pourquoi n'a-t-il rien dit de cette filiation ?

Peut-être parce que tu ne lui as rien demandé.

C'est possible, j'ai eu immédiatement confiance en lui. Le soumettre à un interrogatoire me paraissait indigne.

Pas un interrogatoire mais plutôt un tuilage. Il est assez futé pour ne pas tomber dans le piège des mots et des idées.

Il est donc devenu ton élève ?

Pas mon élève, plutôt mon maître.


Quad il devint roi, Amenhotep devenu Akhnaton décida de quitter Waset. Khainpou le suivit à Akhet-Aton. Il disparut subitement au début de l'An XV du règne, alors tout se dégrada dans la cité solaire. Comme moi, Sa Majesté avait perdu son confident, son conseiller, son frère.


J'ai souvent imaginé les deux garçons se promenant dans les jardins du palais de Malgata , n'échangeant pas des propos sur mes enseignements mais sur la beauté et l'espièglerie des filles de la Cour.

La veille de son départ, Khainpou confia à Imy : Ne sois jamais là où on t'attend.

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