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LE NAOS AVALE LES TROUS NOIRS

Les évènements tombent sur nous comme des météorites. Peu de gens sont capables d'évaluer leur signification.

Un soir, au crépuscule, Sepa entra dans une réalité légèrement modifiée qui commençait sans en avoir l'air à inverser les perspectives, à modifier les proportions. De telles expériences dévalorisent tous les évènements antérieurs, font oublier les cicatrices et les amputations, la composante osirienne des simples mortels.



Sepa se demanda après coup si quelque chose de suffisamment fort s'était vraiment produit pour réussir à troubler sa sérénité. Il lui semblait ne pas avoir oublié la technique pour faire le vide en soi mais fouiller dans les mémoires du cœur JB est une entreprise de longue haleine ne souffrant ni l'improvisation ni les approximations.

Il risquait de se retrouver dans le corps grassouillet d'un touriste visitant les pyramides construites deux millénaires après la mort du dernier pharaon. Ce possible horrifique lui fit abandonner son rêve de réincarnation. Autant descendre dans les profondeurs inexplorées d'un puits.


Quand il ouvrait le coffre contenant ses petites affaires personnelles, il pouvait contempler la magnificence du crépuscule. Au sortir de l'enfance, il avait rencontré un des gardiens de l'en-deçà qui lui avait dit : Rien ne t'empêche de sortir mais il faut faire vite avant que je ne change d'avis. Dans cette contrée limitrophe les évènements ne suivent pas leur cours, ils changent sans arrêt de rives, de masques, de dialectes, d'intentions mais ces changements essentiels restent imperceptibles.

Il est facile de se familiariser avec les choses qui ne reposent pas sur un socle solide. Cependant le familier peut devenir létal et nous tuer à la manière du venin d'un serpent qui dissout ce qui se trouve à l'intérieur.

Les menaces sont bien là mais à peine repérables. On ne renonce pas volontairement aux subterfuges qui perturbent les sagas évènementielles où l'on mutile le corps sacro-saint d'une divinité.


Pour ne pas être acculé contre les portes Sepa ne tenait aucun compte des heures de fermeture des temples. Il aimait les sites redevenus déserts et silencieux, gris-pâle après avoir écarté les ultimes possibilités d'éblouissement.


Chaque évènement occulte le précédent. Les décalages horaires deviennent insurmontables. Le Naos avale les trous noirs. Le Netjer s'en moque car il sait que dans un univers en extension on repousse toujours plus loin les limites de la compréhension.


Les rituels retardent l'irruption brutale des évènements. Sepa continuait à écrire car il ne savait plus s'il était mort ou vivant, s'il parviendrait encore à tracer les hiéroglyphes. Se contenterait-il longtemps de ses multiples imperfections ?

Il n'était pas là depuis si longtemps, tout cela n'avait plus d'importance et même de signification.

Les plus humbles des évènements laissent des traces sur les papyrus.

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