LA MISSION DES CHATS DANS LE TEMPLE
- scakhepri
- 24 juin
- 2 min de lecture

J'aime le pépiement énigmatique des oiseaux dans le silence de la salle hypostyle.
Le matin, l'eau du lac sacré devient verte, on commence à voir les algues minuscules qui l'investissent.
Dans les deux heures précédant l'aube, on a accès à la vie intérieure du monument, à sa singularité.
Du nord au sud, je traverse le temple le plus lentement possible.
Le temps continue à être doux, je n'ai nulle envie de franchir les portes du pylône. Les rêves se brisent contre les portes. J'évite de séjourner sur le seuil où stagnent des ondes de mort, des filaments de tristesse.
Le temple est débarrassé de toutes ses reliques, plus aucune odeur de pourriture. Les chats gardent dans leur fourrure le parfum des résines de Pount. Les étoiles du septentrion continuent à scintiller dans leur pupille.
Le Fils de Hapou traverse la cour à portique en marmonnant des incantations à Opet et Khonsou. Il est escorté par son matou le plus fidèle. Il a calculé avec minutie les dimensions et les angles de cette cour dont la splendeur devient évidente les nuits de pleine lune. Un dieu enfant joue avec les singes de pierre puis les entraîne dans le jardin au sol couvert de mélilot et de fleurs de mandragore.
Je porte des bracelets sertis de pierres météoriques.
Un lézard s'incruste dans les ténèbres.
Je respire, je ne me souviens plus d'être mort ou d'avoir connu la déchéance des Esprits ayant perdu leurs ailes. Un bloc de l'architrave se détache et vient s'écraser à mes pieds. Le Fils de Hapou avait remarqué la fissure qui s'agrandissait sur la pierre. Un mauvais génie était responsable de la catastrophe imminente.
Tapis dans l'ombre, les chats nous attendent pour passer dans l'autre monde, enveloppés d'un châle de lin que les serviteurs du dieu vert découperont en fines bandelettes.

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