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ICHNEUMON

Les Egyptiens sont les seuls au monde à avoir divinisé les ichneumons. Il est vrai qu'ils n'en étaient pas à leur coup d'essai car ils avaient pratiqué cette opération sur les iules, les grenouilles, les scorpions, les bêtes à poils, à plumes, à fourrure, à écailles et bien sûr les incontournables scarabées qui arrivent en tête du palmarès.

Les mouches n'entrèrent pas au panthéon car il n'existe guère de bestioles plus horripilantes. Toutefois, pour récompenser un serviteur zélé de l'Etat, le roi pouvait lui conférer une Mouche d'or, sorte d'équivalent de notre médaille du mérite. Les soldats surnommés les Mouches avaient pour mission d'harceler avec obstination les ennemis de Kemet. La nuit, ce même rôle était tenu par les moustiques qui ne sont pas moins agaçants.

Dans une modeste rest- house de l'oasis de Siwa, j'avais passé une nuit dantesque à me faire piquer par tous les bouts. Au matin, un peu boursouflé, je gagnai la salle du petit déjeuner.

La table était couverte d'un toile cirée crasseuse sur laquelle s'abattaient des milliers de mouches. On ne savait plus où poser sa Vache-qui-rit. Je pense qu'on peut ranger mouches et moustiques dans la catégorie des créatures séthiennes. Les puces et autres petites vermines aussi.


Venons-en à des considérations plus philosophiques.

Akhnaton considérait comme beaucoup de ses sujets qu'il n'existe pas de hiérarchie entre les êtres peuplant la création. Il dit : Il existe une parenté profonde entre les végétaux, les animaux, les minéraux et les humains. Tous baignent dans les rayons bienfaisants de l'Aton. Ils dépendent les uns des autres. Pour être plus clair, un homme n'est en rien supérieur à une plante ou à un animal. Non, l'homme n'est pas le maître de l'univers. On peut bien parler d'une pensée écologique que nous ferions bien de méditer.


La loi égyptienne ordonnait de respecter, d'aimer et de nourrir les animaux. On peut communiquer avec leur esprit et ils ont beaucoup à nous apprendre. Les animaux ne sont pas des serviteurs mais des partenaires et surtout des manifestations du divin. Ils sont le réceptacle des puissances transcendantes et l'incarnation de l'invisible dans le visible.

Le roi est un lion, un taureau, un scorpion, la reine un hippopotame ou un vautour, les prêtresses de Neith sont des abeilles. Toutes les divinités féminines peuvent prendre la forme d'un cobra ou d'une vache. Aset est une hirondelle à ventre rouge ou une milane, Imn un bélier, Inpou un loup, Sobek un crocodile, Seth une sorte de lévrier à museau de fourmilier, Djéhouty, un babouin ou un ibis, Ousir un poisson latès ou un tilapia. Bref, tuer un animal revient à assassiner un dieu. Tuer un chat était passible de la peine de mort.

Après leur mort, les animaux comme les humains justifiés se transforment en Osiris et entrent dans le domaine des métamorphoses.


Il est difficile d'expliquer l'origine et les raisons de ces associations dieux-animaux qu'on nomme des hypostases traduisant l'insondable mystère du divin. Il est vraisemblable que ce système plonge ses racines dans le totémisme de la Préhistoire et dans le chamanisme qui a toujours considéré les animaux comme des Esprits alliés de l'humain.


Dans la langue égyptienne, sur les 800 signes de base on trouve quelques 180 hiéroglyphes d'animaux ou de parties animales comme la tête, les pattes, la queue, les ailes, l'avant ou l'arrière-train.


L'ICHNEUMON est une mangouste de la taille d'un chat, de la famille des viverridés. On le nomme à tort Rat du pharaon. Sa classification a posé problème. Certains y voient une musaraigne, d'autres une loutre ou une genette. Aujourd'hui on penche plutôt pour la mangouste, très présente dans l'Egypte ancienne. Les Egyptiens la présentent comme une grosse gloutonne.

Khatry et âdj sont ses noms égyptiens. Le premier est un nom zoologique, le second son patronyme théologique.

Ce petit carnassier prédateur aime les zones humides et vertes, les marécages, les rives du fleuve et les champs parcourus de canaux d'irrigation. Son museau est triangulaire, ses pattes courtes , ses poils drus et courts, sa queue longue et souple. Il est souvent représenté dressé sur ses pattes arrières, les pattes avant adoptant alors la position de l'orant.









Il grimpe sur les tiges de papyrus à la poursuite des oiseaux. Ichneumon est un mot grec qui signifie : il suit une piste. Il apprécie également les rats, les serpents et les œufs de crocodile. La légende dit même qu'il s'introduit dans la gueule des crocodiles pour leur dévorer les entrailles. Technique de chasse un peu risquée et non avérée.






On sait qu'à la huitième heure de la nuit, le vilain serpent Aapep s'attaque à la barque du Soleil Noir pour la faire chavirer. Dans certaines versions, l'astre prend alors la forme d'une mangouste de 46 coudées soit 24,15 mètres pour abattre le reptile maléfique. L'ichneumon est donc un allié de la lumière, un protecteur de l'Ordre. Très apprécié, il est vénéré à Iounou-Héliopolis, Saïs, Athribis, Létopolis et Bouto où il est associé à la déesse cobra Wadjet.

Dans la même cité de Bouto - Pé et Dep - l'ichneumon est l'aspect complémentaire d'une forme d'Hor nommée Hor Khenti-n-irti. Cet Hor aveugle a une nature nocturne. De son côté l'ichneumon représente son côté diurne et sa forme voyante. On entre ici dans la face cachée et complexe des divinités égyptiennes.


Une fois mort, l'animal momifié est placé dans un petit coffre en bronze.

Un millier de ces petits sarcophages ont été retrouvés dans la nécropole d'Abu Rawash, entre Guiza et Létopolis.




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