Le temple était déserté depuis deux millénaires, il respirait encore, il se souvenait de la musique des sistres et du cliquètement des mains d'ivoire de la déesse, de la voix si particulière de certains officiants qui furent des ritualistes impeccables ne s'attardant pas sur des futilités.
Pour vivre en un lieu aussi fort, il faut renoncer à la logique commune, détecter la moindre fissure à l'intérieur du corps parfait d'une statue en pierre dure. Les derniers lambeaux de tristesse avaient disparu, restait le souvenir vivace des dieux indigènes qui n'avaient jamais quitté l'Egypte.
Une vague inquiétude m'envahissait tandis que j'explorais tous les recoins du monument assoupi. Nous étions au milieu de l'été. J'avais l'impression que les hiéroglyphes s'enfonçaient toujours plus profondément dans les murs. Ils seraient bientôt engloutis comme les îles de l'archipel pountite.
J'aurais aimé que le temps s'arrête afin que le temple échappe à l'entropie, que les colosses royaux prennent des postures encore plus hiératiques.
Entre midi et minuit tout redevenait possible. A chaque heure, le rythme cardiaque du temple se modifiait. Le sol couvert d'argent de la salle hypostyle était baigné par les eaux de la crue.
J'ai oublié que j'étais dans le temple. J'ai oublié le monde tout autour. Je ne voulais pas être repéré. Je n'attendais plus personne depuis longtemps. Je ne sais plus si les prédictions se sont réalisées.
Le temple est-il encore réel ou la projection d'une Egypte à la dérive aux confins d'une galaxie s'éloignant toujours plus vite du centre ?
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