Il voyait des choses qui échappaient aux yeux des simples mortels. Les Loups étaient revenus en Abydos. Il ne supportait pas l'idée d'un corps dépecé, l'odeur du sang, les sagas mythologiques à la glaçante cruauté.
SETH était une canaille rompue à toutes les entourloupes politiques. Il connaissait tous les coups bas, les codes secrets, les mots de passe, les mille subtilités des arts martiaux et des armes blanches.
Il préférait que rien ne se passe dans l'ordre. Ce n'était pas un personnage de fiction qu'on pouvait éjecter à tout moment du mythe. Il avait du sang sur les mains mais il était toujours tiré à quatre épingles. Aucune tache suspecte sur son pagne de lin plissé, pas de lueurs perverses dans ses yeux. On avait affaire à un perturbateur anonyme.
Il parlait doucement, comme un psychanalyste en train de somnoler en écoutant ses patients. Pas de cris, de gémissements, plutôt un discours apaisant qui ne fatigue pas les oreilles des hommes et des Esprits. Il savait qu'il était un dieu et pouvait tout se permettre, même de tenir des propos blasphématoires, injurieux contre son frère ou ceux qui ne pensaient jamais à mal. Il s'esquivait avant que le filet ne se referme, avant que le bruit et la fureur ne deviennent trop évidents. Ses détracteurs le disaient stupide, il se gardait bien de les détromper pour mieux les prendre à rebours.
Les doigts impeccablement manucurés, il maniait avec dextérité tous les claviers, correspondait avec les arnaqueurs de tout poil, les Saint Jean bouche d'or le tenant pour un vénérable maître. Il riait dans sa barbe postiche et n'avait nul besoin d'enfoncer les portes ouvertes.
Il fut démasqué par un auteur de polars nordiques mais comme plus personne ne croyait en Dieu cette découverte resta sans conséquences.
Dieu, disait Seth, c'est une Intelligence artificielle, une couette une nuit d'hiver, un cyborg jamais là quand on a besoin de ses services.
Devant lui je me mis à claquer des dents, état d'alerte maximum mais il me prit dans ses bras, me fit un câlin et je fondis comme une banquise déjà fragilisée par le réchauffement climatique. La tendresse, la douceur, l'affection étaient ses armes secrètes.
Il m'a guéri d'une sévère déprime qui me rongeait depuis la disparition du Double Royaume des pharaons dont certains revendiquèrent le patronage d'un dieu puissant et au fort potentiel de séduction.
Grâce à lui, sans le savoir, nous vivions dans un monde parallèle où se côtoyaient le pire et le meilleur. Les crimes se succédèrent, la gangrène se propagea, les espaces se réduisirent, le bruit devint assourdissant. Les enfants de Seth, adeptes du tourisme de masse, continuèrent à prospérer, à danser sur le volcan.
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