Un historien grec de l'Antiquité a souligné que les Egyptiens étaient les plus religieux des hommes. A religieux je préfère mystique, en empathie avec l'Esprit du cosmos et les Esprits de la Nature. Les Kémitiens entretenant le goût du secret ont peu écrit sur leurs innombrables divinités. Pas de livres sacrés, pas de récits circonstanciés sur Aset, Djéhouty, ou Hor. Même le mythe osirien n'a pas fait l'objet d'un récit suivi et complet. Les éléments sont livrés dans le désordre, l'histoire est démembrée comme le dieu.
On trouve des indices éparpillés sur les parois et les colonnes des temples, les murs des tombes, les vases sacramentels, les bijoux, les grands corpus funéraires, les contes comme celui de l'Oasien ou du Naufragé. Les dieux égyptiens nous sont livrés en kit, à nous de tenter de les cerner, de les retrouver à la manière d'une mosaïque ou d'un kaléidoscope.
Et toujours plus d'images que de mots. Nous allons maintenant tenter de jeter quelques coups de projecteur sur Ptah, un des dieux les plus considérables du panthéon pharaonique.
PTAH DIEU SUPRÊME
Il est dit dans la théologie memphite que tous les dieux et leur KA émanent de lui. Il représente une succession hiérarchique de manifestations et de transformations. C'est pour cela que ses adeptes les artisans sont des alchimistes cherchant le secret de la matière et les modes opératifs pour la transformer afin qu'elle libère toutes ses potentialités.
Netjer symbole de la matière embryonnaire, il est souvent figuré sous la forme d'un fœtus. On parle alors des Ptah-Patèques.
PTAH HETEP
Ptah est la cause de la vie mais il ne devient vivant que lorsqu'il est délivré par l'état Hetep qui lui permet de réaliser l'union entre lui et les choses animées ou en voie d'animation. On remarquera que PTH est l'inverse de HTP. Le FEU de Path est destructeur avant de devenir régénérateur. Pour créer et concilier les natures opposées, il doit être en paix. Hotep est aussi le mot Paix, la plus accomplie des offrandes.
LA FÊTE SED
PTAH est la divinité de la célèbre Fête du HEB SED, un rituel complexe qui permettait au roi, tous les trente ans, de se régénérer entièrement.
Par extension, le netjer de Memphis assure la verticalité de l'homme au sommet de sa réalisation spirituelle. Maître de l'Ennéade, Ptah, Celui qui ouvre, est le patron de la théocratie pharaonique et des nécropoles où les défunts se transforment en se régénérant.
LA FILLE DE PTAH
Le papyrus Harris mentionne que PTAH rend visite à sa fille NEBET-NEHET dont le sanctuaire se trouvait un peu au sud de Memphis.
Cette déesse plutôt discrète est une Héliopolitaine dont le nom signifie La Maîtresse des offrandes ou La Maîtresse de la satisfaction. A Iounou, proche de Iousâas, elle est la parèdre de TEM, sa composante féminine. Elle est aussi une forme d'Hathor, principe érotique, complément de la divinité masculine de la création.
PTAH BAPHOMET
Le Baphomet est une entité divine énigmatique que les Templiers révélèrent aux adeptes occidentaux. Son nom n'est rien d'autre qu'une déformation de celui de l'antique Ptah. Il est noir et associé aux mutations résultant d'un travail de type alchimique sur la matière. On le désigne parfois sous le vocable de Chèvre-pieds ou pied bot, c'est- à- dire atteint d'une infirmité sacrale qui en fait le régent des rites mystagogiques. L'initié est celui qui boîte, qui marche autrement sur d'autres chemins qu'emprunte aussi le Grand PAN, dieu des bergers d'Arcadie.
PTAH NOUN
Dans une litanie du Ramesseum, le dieu de Memphis est qualifié de PTAH-NOUN, le Bien aimé. Il est ainsi associé à la crue et au Noun Primordial dont le Taureau est l'une des manifestations. N'est-il pas à Memphis le père du Taureau divin APIS, HEP en égyptien, dont le culte remonte à la première dynastie. Un animal sacré qui posséde des caractéristiques bien définies : il est noir, haut sur pattes avec un losange blanc sur le front, un dessin d'oiseau sur le dos, un scarabée sur la langue. Sa mère est Aset ou la vache divine HESAT. Un disque solaire se dresse entre ses cornes avec le cobra royal Uraeus. Vénéré dans un temple de la vieille capitale, il rendait des oracles.
Il était assimilé à une force génésique de nature lunaire, il assurait l'abondance des récoltes et la fécondité des troupeaux.
Il était momifié à sa mort et inhumé à l'intérieur d'un énorme sarcophage de granit dans le Sérapeum de Sakkara.
L E NETJER AU MANTEAU DE PLUMES
On le voit bien sur la statuette retrouvée dans la tombe de Toutankhamon, Ptah est enveloppé dans le manteau de plumes que portent les chamans sous toutes les latitudes. Les plumes, symboles de protection, évoquent la puissance élévatrice des oiseaux divins. Repliées autour du corps, elles montrent un être en état d'incubation, en train de s'animer par la vertu du SA ou fluide de vie.
Plus généralement, les ailes correspondent à l'apothéose, à la divinisation.
TITRES DE PTAH
Ptah, comme beaucoup d'autres dieux, porte plusieurs noms et titres qui révèlent toutes les facettes de sa divinité.
Au Moyen Empire, il est appelé Le Seigneur d'Ankh-taouy, un des noms de la ville de Memphis.
Un de ses titres fréquents est Ptah res-ineb-ef, Ptah qui est au sud de son mur, en référence à un sanctuaire secondaire du dieu situé au sud du grand temple qu'il partageait avec la lionne Sekhmet.
Toujours à Memphis, Men Nefer en égyptien, il porte le titre étrange de Ptah khery,bak,ef , soir Ptah qui est sous son moringa - bak - en référence à un très ancien dieu arbre absorbé par Ptah à une époque reculée et dont le fruit et les graines produisaient une huile d'embaumement nommée BEN. On retrouve le moringa comme ingrédient dans l'élaboration des parfums.
Sous cet aspect, Ptah est associé à Thot sous la forme syncrétique de Ptah-Thot- Kherybakfef.
Quand le roi combat rituellement le serpent AAPEP, il se sert d'un sceptre en bois de moringa.
N'oublions pas enfin que le mot grec EGYPTE est issu de la forme hiéroglyphique HOUT KA PTAH, le temple du Ka de Ptah
BEAU DE VISAGE
Ptah, beau de visage, sublime, qui forma la terre,
Laisse-moi me tenir devant toi, ton Ka devant moi,
Laisse mes yeux contempler ta beauté.
Inscription sur une statue de Berlin.
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