Dans un wadi situé à l'Est de la cité d'Aket- Aton se trouve une vaste tombe qu'Akhnaton fit aménager pour lui et sa famille. Les locataires des lieux ont disparu, les reliefs ont été soigneusement martelés. La tombe est vide mais, dans ce monde minéral on sent la présence magnétique du roi solaire et on se pose cette question : comment le fils de Tiyi et d'Amenhotep III, l'élève du Fils de Hapou, l'initiateur d'une pensée spirituelle inédite, appréhendait- il la mort et ses mystères ?
La tombe est installée sur la rive Est alors que la grande majorité des sépultures et des nécropoles égyptiennes sont établies sur la rive Ouest du Nil. Elle s'inscrit donc bien dans la pensée du roi pour qui la lumière du soleil levant est la glorieuse et sublime manifestation du Grand ITN vivant et triomphant dans sa montagne de lumière.
Disparue ici la vision si bien organisée de l'au-delà à l'égyptienne avec Inpou, Ousir, Aset, la montagne de l'Ouest ou encore Nout en attente dans son sycomore à l'entrée de la Douat.
Dans la cité solaire, on ne parle que de la vie, d'un roi traversant sur son char la nouvelle capitale pour se rendre dans les temples à ciel ouvert afin de déposer des offrandes et pratiquer les rituels.
Comme la pensée héliopolitaine, la pensée amarnienne répugne à une vision de la mort basée sur la putréfaction des corps et le très lent cheminement post mortem sur la Voie Humide.
Sa vision est plutôt celle de la Voie Sèche : une fusion rapide avec les composants de l'univers.
L'Atonisme affectionne l'image du Benou-Phénix qui meurt et se consume spontanément afin de renaître immédiatement.
Attention, ces deux approches de la mort ont toujours cohabité en Egypte, d'une part Héliopolis et de l'autre Abydos.
Avec le temps, la vision héliopolitaine et donc amarnienne se repliera dans le secret des Ecoles de Mystères alors que la voie osirienne gagnera peu à peu toutes les couches de la population kémitienne.
Vision triomphante quand apparaîtra le christianisme, ce qui explique la forte imprégnation osirienne dans la vision chrétienne de la mort et de ses aléas.
Revenons à l'Atonisme qui se veut une mystique expérimentale de la vie. Une vie basée sur la Vérité.
Mon serment véridique est ce que je me propose de dire. Ce que je ne dis pas est mensonge. Texte des stèles frontière.
Ici, Akhnaton soulève une question troublante : il ne parle pas de la mort car il considère que tout ce qui en a été dit est mensonge.
Manifestement, il croit que les images osiriennes de l'au-delà relèvent plus de la vision de ceux qui les ont inventées que d'une quelconque réalité vérifiable.
Cependant, sous son règne, aucune interdiction des pratiques funéraires de type osirien.
On continue à momifier et à célébrer les rites funéraires.
On peut ici réfléchir à l'image de l'après-vie que nous donnent les religions !
En fait, chez Akhnaton, aucune doctrine définie sur la mort ou la survie après elle.
Il se fait toutefois construire une tombe et on le voit pleurer la perte d'une se ses filles.
L'Atonisme est l'œuvre d'un roi jeune.
Avec le temps, sa perception de la mort et de sa gestion mystique aurait probablement évolué.
En épluchant les textes du roi, on peut toutefois dire ce qui suit :
Il croit en la survie après la mort d'un Moi conscient, conservant une certaine individualité.
Il définit parfois la mort comme une régénération, ce qui est de nature alchimique et en conformité avec la pensée d'Héliopolis.
Il parle de corps visible pour les vivants, de corps subtil pour les défunts.
Il fait de nombreuses allusions aux 9 Constituants avec une prédilection pour le KA et le AKH.
Il évoque le KA de l'Aton qui fusionne avec celui de l'humain et le rend immortel.
Quant au AKH, il est au centre de la pensée du roi. N'est-il pas AKHNATON, Celui qui resplendit pour l'ITN.
Le roi pense que si la mort existe c'est que nous sommes imparfaits.
Il en est de même pour le mal.
Le manque de NEFER est notre ferment de corruption.
Tant que nous ne serons pas NFR, nous serons condamnés à mourir afin d'avoir la possibilité de revenir et de nous perfectionner.
Mourir est aussi un dépassement de la conscience ordinaire ouvrant sur d'autres champs d'expériences spirituelles.
La qualité de la mort est en relation directe avec la qualité spirituelle du défunt.
Principale qualité : rester attaché à ce que l'on sait être la Maât.
La Maât serait alors l'ultime réalité après la vie ou encore la clef ouvrant les portes d'un au-delà inédit qui n'a nul besoin des croyances proposées par les religions
Une vision d'une austère beauté, très aristocratique et de nature initiatique.
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