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5 COULEURS FONDAMENTALES

LE NOIR

Le noir n'a jamais eu en Egypte de connotations négatives, malfaisantes. Il n'a jamais donné d'idées noires à personne.

Pouvait-il en être autrement dans un pays qui se nomme kmt, le noir du limon fertile que la crue du fleuve dépose chaque année aux mois les plus chauds de l'année.

Le noir est aussi la couleur du monde souterrain où chaque nuit se régénèrent le Soleil et les défunts du Double Royaume.



Le noir est la couleur de la peau des habitants de l'Au-Delà. La reine Ahmès-Nerfertari est vénérée sous la forme d'une femme noire, image des Vierges Noires que l'on retrouve dans beaucoup de mythologies et qui symbolisent un état particulier où matière et esprit sont réunis dans une œuvre de transmutation.


Les équivalents minéraux du noir sont l'obsidienne, le schiste et le basalte. Les sols des salles hypostyles des temples sont couverts de dalles de basalte pour rappeler la couleur du limon d'où sortent les fûts vigoureux des arbres-colonnes.

Cet usage figure en outre le sol originel d'où tout vient et où tout revient. La couleur ou l'absence de couleur de la substance première, le retour au Chaos primitif.


Noirs sont certains dieux liés à la fertilité : Min, le Scarabée Khépri, Nout, Osiris, Isis et les loups psychopompes comme Inpou, Khentyimenty et Oupouaout qui guident les Mystes dont on dit qu'ils sont noircis, c'est-à-dire initiés aux Mystères tels ceux d'Abydos.


On connaît en Alchimie toute l'importance des couleurs ou Teintures par lesquelles passe la Materia Prima en travail dans l'athanor.

Tout commence avec la phase NIGREDO pendant laquelle le Noir devient plus noir que le Noir et qui s'apparente au démembrement qu'avait subi Ousir après son assassinat par Seth.

Nigra sum sed formosa.


LE BLANC

Le blanc couleur de la pureté, de la sainteté, de la joie du faste et du triomphe est porté par les prêtres ritualistes.

Ce n'est pas une couleur mais la synthèse de toutes les autres.

Elle a la propriété de réfléchir la lumière et de renvoyer les ondes négatives.


La combinaison du blanc et du rouge comme dans le pschent ou double couronne rend l'idée de perfection et d'unité. Blanche est la mitre du sud, rouge la couronne du nord. Dans l'administration pharaonique, le Trésor blanc gère les finances de Haute Egypte, le Trésor rouge celles de Basse Egypte.


Le nom pour blanc est hdj, son métal est l'argent, beaucoup plus rare que l'or en Egypte antique. Il est en relation avec l'aube quand la lumière triomphe de l'obscurité.

Ses équivalents minéraux sont le grès et le calcaire.

Blanche aussi est la plume couronnant Maât, image des rayons lumineux du Soleil.


Dans le contexte alchimique, le blanc est l'ALBEDO qui succède et met fin à la Nigredo et à la noirceur de la mort.

C'est la couleur rituelle du passage, de la renaissance, de la disparation définitive du vulgaire et de l'épais, de l'ouverture d'une nouvelle conscience. Les épreuves initiatiques s'achèvent à l'aube quand le corps et l'esprit sont suffisamment purifiés et que s'est accomplie la conjonction du Fixe et du Volatil.


LE VERT

Wadj, le vert évoque la vie végétale, le renouvellement perpétuel de la Nature, la fraîcheur, la prospérité, la santé et la vigueur de la jeunesse. C'est la couleur du vivant.

Le mot s'écrit avec le hiéroglyphe du papyrus, plante qui cristallise toute la symbolique du vert et du pouvoir de la croissance végétale.


Verte est "la" cobra Wadjet, divinité de la fertilité du sol et des eaux, maîtresse du royaume du nord en sa capitale de Bouto.

Après être passé par le noir Ousir devient vert, ce qui témoigne de sa régénération. Ousir, le Grand Vert est celui qui est revenu, qui a triomphé de la mort grâce aux bons soins et à la science alchimique de son épouse Aset.

Verte est la petite grenouille Heqet qui préside à la naissance dans les mammisi.

Vert est synonyme de connaissance ésotérique et d'accès au divin.


Vert est la teinte de toutes les pierres vertes comme le feldspath ou la malachite qui servait à fabriquer le fard pour les yeux. Ainsi maquillé, on pouvait voir les choses autrement. Le vert cru de la malachite évoque les prairies célestes et fertiles de l'Au-Delà, nommé parfois le Champ des souchets. Le vert de la turquoise est celui des eaux dormantes et calmes.

Sur les momies, les amulettes vertes comme celle de la colonne papyrus assurent dans la tombe l'intégrité de l'être. Une amulette le plus souvent en feldspath ou en faïence verte.


Dans la langue égyptienne faire une chose verte est synonyme d'accomplir une action bénéfique et louable.


En Alchimie, le vert est la couleur de la fermentation initiatique, de la Terre foliée, du Vitriol, du Lion vert et de l'Osiris végétant. Les adeptes écrivent souvent Verd, attaque du mot verdure. Ils utilisent aussi le terme viridité. Le mot vient du latin Vir que l'on peut traduire par virtualité, virulence, virilité.

Le Lion vert est le Dissolvant nécessaire à l'accomplissement de l'Œuvre.

La couleur verte rappelle que la Pierre végète et qu'elle est donc animée, prête à devenir complétement mûre, sa vigueur étant retrouvée.

Sa couleur complémentaire est le rouge.

L'apparition du vert, qui est un aspect du Mercure, indique que l'Opérateur est sur la bonne voie.


LE BLEU

Le bleu, la plus froide des teintes, a un pouvoir rafraîchissant et apaisant.

Dans son aspect lumineux, il offre une puissance vibratoire élevée.

En Egypte, le bleu se présente sous trois aspects :

Le bleu clair, couleur de l'air et des espaces célestes.

Le bleu sombre du lapis lazuli évoquant la profondeur du ciel nocturne parsemé d'étoiles d'or.

Le bleu turquoise figurant le milieu aquatique animé par une lumière invisible.



Pour les Egyptiens, il indique la dimension divine d'un être. La peau et les cheveux des dieux cosmiques sont souvent bleus.

L'IMN de Karnak, netjer aérien et volatil coiffé de deux longues plumes, est un dieu bleu qui se manifeste par le vent. Le bleu des airs, avec lequel il se confond et dans lequel il se dissimule. N'est-il pas l'Invisible Imn baignant des les eaux nocturnes où s'effectue sa régénération !


Le bleu ciel est la couleur d'Isis.

Le bleu sombre proche du noir, la teinte de sa mère Nout ainsi que du Noun.

Le bleu est par contre absent de la symbolique égyptienne.


Pharaon porte une couronne bleue qui manifeste sa nature cosmique.

Cette couronne, le Khepresh, apparaît dans l'iconographie royale sous la XVIIIe dynastie. Elle n'est pas un casque de guerre comme on le dit souvent mais la couronne d'un prêtre-roi habité par la divinité et conduisant les rituels. L'étymologie du mot kherep est le verbe diriger, conduire. Khepresh est en relation avec le KA royal.


Le fameux bleu égyptien d'une luminosité intense, apparu durant la 4e dynastie, n'est pas tiré du lapis lazuli. C'est une couleur synthétique obtenue en chauffant à plus de 700° un mélange de sels, soude, chaux, cuivre, calcite et sable associés à un fondant, le sel de sodium.

Le bleu d'Amarna que l'on rencontre sur des œuvres de prestige contient un aluminate de cobalt provenant des oasis du désert libyque.


Dans l'art de Thot-Hermès, bleu est la couleur révélatrice de l'initiation associée à la rosée céleste et aux astres du ciel. C'est la première couleur de l'Œuvre, qui a la particularité de rester invisible tel le dieu de Karnak à la nature alchimique considérable.

Ne dit-on pas qu'un néophyte est un bleu ou qu'il n'y voit encore que du bleu. Lorsqu'il le verra enfin, les portes commenceront à s'ouvrir avec le secours d'anges aux ailes teintées de bleu.


LE ROUGE

Dans la pensée égyptienne, le rouge, couleur chaude et puissante, revêt deux valeurs très ambivalentes : il incarne d'une part la violence, la colère, les forces déchaînées des divinités comme Seth. D'autre part, il est la couleur du sang, des forces vitales et de la lumière solaire source de vie.


Seth a les yeux et les cheveux rouges. Il est rouge comme les montagnes du désert brûlant qui est son royaume.

Rouges sont les déesses au potentiel dangereux comme Sekhmet, Tefnout ou Hathor.


Autres ambivalences : le rouge est la couleur des ennemis, des étrangers vecteurs de désordre mais aussi celle des briques de naissance sur lesquelles accouchent les femmes.

La couleur traditionnelle du Sphinx est rouge et traduit son aspect dangereux.

La couronne du Nord est rouge car elle donne au roi la force et le pouvoir de chasser les ennemis du Double Royaume. Un Nord pourtant voué au cobra Wadjet dont le vert est la couleur emblématique.


Les pierres rouges que l'on retrouve dans les bijoux prophylactiques sont la cornaline, le jaspe et le grenat. Un rouge qui évoque ici le sang qui palpite mais aussi les maladies qui affligent les vivants.

Le rouge de la cornaline a des nuances qui vont du brun-rouge au rouge brique en passant par le vermillon. Il sert à colorer le bois, la chair des personnages masculins, la viande, le sable du désert, le cuir, les poteries et certains habits et étoffes.


Dans les temples, on peignait en rouge l'encadrement des portes afin d'interdite l'accès aux démons, destructeurs de la sacralité du monument divin.

A Khemenou, c'est encore la couleur de l'Île de Feu dont les flammes dévorent les ténèbres.

Ici, le rouge peut maîtriser ou détruire.

Dans l'écriture, le rouge renforce l'efficacité des formules magiques, renvoie l'agressivité contre l'ennemi. Le premier hiéroglyphe d'une phrase est de couleur rouge alors que les autres signes sont noirs.


En Alchimie, le rouge est la teinte de la RUBEDO, ultime phase de l'Œuvre qui en marque la réussite.

Le rouge alchimique est plus précisément le pourpre évoquant à la fois un rouge profond, la pureté et une perfection permettant d'obtenir la Pierre Philosophale. Du rouge sort l'or de la divinisation.


THOT est le netjer de toutes les couleurs de l'Œuvre.




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