Asetemkheb n'allait pas très bien, la vie s'acharnait à la rendre lourde, elle était tout le temps patraque et déprimée.
Il se dégageait d'elle quelque chose de psychotique.
Quand elle sortait, les gens la regardaient de travers ou s'enfuyaient.
Une amie, prétendument bien informée sur le monde occulte, lui assura qu'elle était envoûtée.
Un prêtre de Khonsou, un dieu bien connu pour ses dons thérapeutiques, l'écouta d'une oreille distraite.
Les histoires de maraboutage n'étant pas sa tasse de karcadé, il les traitait par-dessus la jambe, comme s'il s'agissait de simples lubies ou du besoin de se rendre intéressant.
Pour la calmer, il lui posa cependant quelques questions :
- Qu'avez-vous fait pour mériter d'être possédée ?
- Rien, je suis une ménagère consciencieuse, une épouse vertueuse.
- Auriez-vous suscité la jalousie d'une voisine ou d'un homme épris de vous ?
- Si c'est le cas, c'est bien malgré moi, je m'efforce d'être gentille avec tout le monde.
- Justement, les gens trop gentils peuvent devenir exaspérants.
Vous avez peut-être offensé un mort ?
- Je ne crois pas à la malveillance des défunts. De plus personne n'est mort dans mon entourage depuis longtemps.
- Seriez-vous une adepte des vies antérieures ?
- Non, la mienne me suffit bien.
- Alors vous croyez sans doute aux esprits qui vivent autour de nous.
- Oui, le petit peuple des Agathodaïmons me passionne.
- Vous les fréquentez ?
- Je les rassemble souvent dans mon jardin, autour du bassin et leur offre des repas.
- Quels aliments leur servez-vous ?
- Des fèves cuites à la vapeur et du poisson grillé.
- J'ai compris, vous les contrariez, ils détestent les fèves et encore plus le poisson. Par contre, ils raffolent de galettes à l'épeautre et de canard aux olives.
Asetemkheb suivit ses conseils, elle retrouva sa joie de vivre mais elle eut beaucoup de mal à écouler le stock de fèves accumulé pour les petits génies.
Comments