Je n'ai pas envie de susurrer des prières au milieu des nécropoles. Je regrette seulement que tous les Kémitiens soient morts sans autre forme de procès. Leurs images sont si intenses qu'elles jouent avec nos nerfs. Je m'obstine à vivre pour contempler encore un moment les témoignages d'un temps en apparence révolu. Les Kémitiens existent dans un indéfinissable ailleurs où je cherche à trouver ma place.
Je me demande si je n'ai pas été marabouté la première fois où j'ai posé le pied dans une syringe. Bien sûr, le mort était parti depuis longtemps mais il avait laissé de nombreux indices permettant de retrouver les traces de son univers. Après ma déambulation, je rentre à l'hôtel où, depuis la terrasse, j'observe le fleuve qui coule sans faillir depuis des millénaires.
Devant la porte qui sépare le royaume des vivants de celui des morts un sentiment de danger croît en moi de façon diffuse. Au-delà de cette limite plus de droit à l'erreur, plus d'hésitation possible. Tem s'est fourvoyé en sortant le Noun de son inertie, ce qui permit à la création de devenir une œuvre de mort. Lui qui pensait avoir installé l'univers dans la durée, l'avait seulement posé dans la précarité et l'éphémère. Les tombes de Kemet sont des trous noirs.
Aucun Kémitien d'origine n'est véritablement mort Pour détourner l'attention, les sujets du roi du monde ont construit des tombes dont l'objectif principal est de nous laisser un témoignage de leur art consommé de la fresque. Les Egyptiens sont de gentils prédateurs d'immortalité, les plus accomplis des astrophysiciens.
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