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La discrétion des êtres surnaturels.

  • scakhepri
  • 1 août 2022
  • 2 min de lecture

Depuis des années je menais une enquête sur cette divinité pour laquelle j'éprouvais une grande tendresse qui, peu à peu se mua en passion amoureuse. Les informations souffraient de contrastes tranchants. Les origines se perdaient dans la nuit de multiples passés. Venait-elle du Delta, de la lointaine Nubie ou d'une contrée qui n'existait plus que dans les mythes?



Elle ne se manifestait pas dans une lumière naturelle mais dans les lueurs qu'on obtient la nuit en brûlant du bois de sycomore lors de rites appropriés et au moment où elle en avait envie.

Les mythographes de Kemet s'étaient bien intéressés à elle. Les scribes de l'Ancien Empire puis, ceux de la Basse Epoque avaient exhumé des rituels que l'on ne pratique qu'une fois par siècle, le 7e jour du 7e mois, la septième année de règne d'un souverain. Elle était si discrète que son nom mal défini était souvent mal orthographié On la confondait avec des entités divines entretenant avec elle des rapports incertains.


Ses images ne me perturbaient pas car on la représente rarement. Ses attributs divins n'étaient pas fixés par des pratiques magiques. La Magie est l'art d'esquiver les contraintes pour se concentrer sur l'affleurement d'un sable rouge trahissant la présence de l'or.

J'ai rencontré un vieil officiant qui avait été à son service. Il ne se souvenait de rien d'autre que de la douceur qui l'envahissait quand il devinait sa présence derrière les portes du naos.

Comme lui, je n'ai pas réussi à l'intégrer à ma vision mais à des sensations, à tout ce qui est trop volatil pour être fixé dans l'espace ou le temps, dans une étreinte ou un rapport de force.


La discrétion des êtres surnaturels est parfois surprenante. On dirait qu'ils ne veulent pas être contaminés par la vulgarité de notre approche, d'une exigence qui leur rognerait les ailes.


Je me demande si je pourrais survivre à sa disparition ou si j'apprenais qu'elle n'avait jamais existé que dans les méandres de mon être intérieur. En en m'imposant rien, en refusant le contact, elle avait rendu son existence plus cérémonielle encore, inaccessible à l'intellect, à la piété.


S'est-elle réfugiée dans un fourré de papyrus, dans l'espace qui sépare le profane du sacré, dans cet inter- monde où ne pénètrent ni les vivants ni les morts ?

Je n'ai pas peur, je ne veux pas la déranger. Je vais lui faire comprendre que je finirais bien par l'oublier afin de ne pas troubler sa quiétude.

 
 
 

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