Le désert propice à l'activité métaphysique.
Pas d'arrêt quand on chemine dans le désert.
On est aspiré par le Vide, à chaque pas l'horizon s'éloigne.
Le désert s'infiltre dans l'imagination, fait surgir des créatures immondes ou merveilleuses, amies ou ennemies, féroces ou bienveillantes.
Ici errent les rêves de tous les baliseurs qui furent les premiers à emprunter des pistes incertaines.
Je suis un étranger dans un paysage en apparence immobile, en état de choc devant tant de solitude et de beauté.
J'observe sur le sol des traces qui ressemblent à des carrefours. Chose incongrue dans le désert. Si on change de direction, on tourne en rond et les frontières se multiplient.
Des éléments très anciens habitent les espaces désertiques. Seuls les faucons volant très haut dans le ciel peuvent les apercevoir.
A l'orée du désert se retirent ceux qui n'ont plus la force d'entretenir les nécropoles et les infâmes voleurs qui dépouillent les morts.
Certaines pistes mènent dans la Douat.
Existe-t-il autre chose au-delà de la Douat ?
Les dieux, les légendes, les marchandises, les idées empruntent les routes de nos paysages intérieurs, entre le familier et le surnaturel, à la recherche de royaumes non répertoriés par les cartographes.
Comme j'étais dans la main de MIN, je n'osais pas lui avouer que j'étais d'une impiété constante. Pour me faire pardonner, je marchais pieds nus sur le sable jusqu'à ce que la brûlure devienne insupportable. Cela se rattache à une expérience sensorielle du désert qui peut vous rejeter ou vous adopter.
Par mégarde, j'étais entré dans un domaine où il est interdit de s'arrêter, de ramasser un fragment de bois fossilisé, de parler car rompre le silence déclenche une malédiction.
Où pouvait se cacher cet ermite dont on m'avait parlé dans la Vallée ? Plus je me focalisais sur lui, plus il se dérobait. En fait, je redoutais de le rencontrer car que lui dire, , comment espérer qu'il répondrait à mes questions ? Je devinais cependant qu'il se tenait au centre de terribles merveilles, bénéficiant des énergies les plus puissantes du désert, se nourrissant des racines succulentes des wadis où coule une eau fantôme. Il écrivait des rituels pour des tribus qui n'existent plus et savaient ensemencer le sable.
On imagine que l'on marche dans le désert. Le plus difficile est de ne pas rester seulement en surface. Ce désert est bouleversant quand il se replie sur lui-même et libère le SAHU qui l'habite depuis des temps géologiques.
Désert, lieu des spiritualité errantes, des pèlerinages à accomplir pour des divinités nomades en l'honneur desquelles des cairns sont dressés mais aussi des bétyles et des cercles de pierres.
Les baliseurs du désert dispersent dans la nature l'identité des entités démiurges qui croient qu'elles sont à l'origine de la création. Elles sont des scarabées perdus dans la démesure des grandes mers de sable.
Les baliseurs savent se mouvoir dans un monde truffé de fondrières et de sables mouvants. Ils n'empruntent jamais deux fois le même itinéraire. Un chemin ne sert qu'une fois. Ils appartiennent à la cohorte des Shemsou Hor qui ne cheminent jamais au hasard.
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