Le roi Pépi II est encore un enfant quand est organisé un voyage de découverte de l'Afrique intérieure, le Pays de Iam. Sur le chemin du retour, Irkhouf, le chef de l'expédition, adresse une lettre à Sa Majesté pour l'informer des merveilles qu'il rapporte : bois d'ébène, or, peaux de panthère, autruches et surtout un nain. Le roi est ravi et recommande à Irkhouf de prendre grand soin de ce petit homme qui est peut-être un Pygmée. Surtout qu'il ne passe pas par-dessus le bastingage, qu'on le traite avec tous les égards, les sanctions seront terribles s'il n'arrive pas sain et sauf dans le Double Royaume. Toutes les richesses rassemblées ne sont rien au regard de ce nain dont il est précisé qu'il exécute à la perfection la danse jba célébrant le lever du soleil.
On a retrouvé de nombreuses amulettes de nains. Elles sont en faïence bleue, le crâne est volumineux, le corps nu légèrement penché vers l'avant, les jambes fléchies vers l'extérieur, les mains posées de part et d'autre d'un ventre proéminent, symbole de fécondité.
Les Egyptiens tiennent les nains en grande considération et les placent dans la sphère du divin.
Nous reparlerons ailleurs du dieu nain Bès.
Les nains sont d'abord la forme fœtale du soleil en gestation sur le point de renaître.
Dans le Papyrus 348 de Leiden se trouve une formule que le Mage doit réciter quatre fois au-dessus d'une figurine de nain placée au-dessus du corps des femmes en couches.
Difforme, il ne menace pas l'ordre du monde mais renvoie à ce qui est autre dans l'humain. Comme il ne grandit pas, il est immuable et donne une image de dieux éternellement juvéniles, le plus souvent associés à Hor ou à Khépri, transpositions humaines du soleil en vieillard qui rajeunit.
La ressemblance du nain achondroplasique avec un nouveau-né n'a pas échappé aux Egyptiens. C'est un être à part, comme les enfants.
Très appréciés à la cour, les nains peuvent accéder à de hautes fonctions dans l'administration. Un nain peut être majordome au palais, attaché à la garde-robe et à l'orfèvrerie de la famille royale.
Protecteurs des hommes, ils sont associés à la musique et à la danse, à la fertilité et à la sexualité.
Lors de la fête SED, coiffés de roseaux, ils dansent pour célébrer la régénération du nouveau roi.
Les nains Nemyous dansent lors des Mystères osiriens pour réjouir le cœur d'Osiris.
A Saïs, un nain est le protecteur de la déesse Neith et dispose d'un clergé de prêtresses qui portent son amulette autour du cou.
Les nains les plus célèbres sont les Pataikos ou Patèques du dieu Ptah à Memphis. Le mot viendrait d'une déformation du nom Ptah.
Divinités cavernicoles de la terre, ils œuvrent dans les mines et assistent le dieu forgeron dans ses travaux d'orfèvrerie et de sertissage des métaux. On voit d'où viennent les nains de Blanche Neige, gardiens de trésors !
On sait que les forgerons sont souvent considérés comme des magiciens redoutés travaillant les métaux de toutes les manières avec le secours de la Magie opérative. Maîtres du feu, le plus mystérieux des éléments, ils peuvent jeter des sortilèges ou repousser les forces négatives de la terre et de l'eau. Ainsi, ils protègent les marins des périls de la mer et de la navigation.
En alchimie, les Patèques représentent l'esprit vital des métaux et des métalloïdes, la force régénératrice de la terre ainsi que la dynamique occulte des corps bruts. On parle alors de Gnomes, un mot dont le premier sens est Esprit mais qui signifie aussi Connaissance.
Coiffés d'un scarabée, ils portent parfois la couronne atef flanquée de plumes.
A la Basse Epoque, les Patèques sont considérés comme la forme secrète de Ptah, associé à Héphaïstos par les Grecs d'Alexandrie.
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