Il avait tourné le problème dans tous les sens avant de se rendre compte qu'il l'avait pris par le mauvais bout. Qui venait dans sa maison quand il était absent ? Comme il accordait au rangement un soin méticuleux, il se rendait compte immédiatement si un objet, un meuble, un vêtement avait été déplacé imperceptiblement.
De tout cela il n'avait parlé à personne, de crainte qu'on ne le prenne pour un maniaque ou un frapadingue.
Le malaise s'intensifiait. D'où venaient les perturbateurs qui modifiaient jusqu'aux ondes sonores et olfactives de sa confortable demeure ?
Des voleurs auraient emporté quelque chose, des curieux auraient laissé des indices de leur passage, des Esprits malveillants auraient rendu la maison inhabitable. On était à la limite du familier et de l'étrange.
Il conservait dans un coffret en ébène une collection de scarabées léguée par un de ses oncles et qu'il avait enrichie au fil du temps. Il eut l'idée de les compter et en dénombra 289. Huit jours plus tard, il n'en restait que 153. Au terme de trois décades, un seul avait résisté à la disparition pure et simple. Il l'enveloppa dans une bandelette de lin qu'il dissimula à l'intérieur d'un rouleau de papyrus. Dès le lendemain, il s'était volatilisé.
Tout se figea et il commença à sentir que son KA s'évadait peu à peu de son corps. Il était épuisé, son BA avait fait ses bagages et restait pour l'instant perché sur une branche du vieux sycomore planté dans son jardin.
Il était à deux doigts de rejoindre ses Ancêtres quand trois coups furent frappés à la porte. Une créature à vrai dire indescriptible lui plaça l'ultime rescapé dans la main gauche en déclarant : Si tu te tiens tranquille et ne me cherches plus des poux dans la tête, je te rendrai l'intégralité de ta collection mais je dois te prévenir, les scarabées qui appartiennent à la sphère du volatil n'aiment pas rester enfermés dans une boîte. Une dune de sable dans le désert leur convient beaucoup mieux.
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